acte III – Scène 2
NICOLE, MONSIEUR JOURDAIN,
LAQUAIS.
MONSIEUR JOURDAIN: Nicole!
NICOLE: Plaît-il?
MONSIEUR JOURDAIN: Écoutez.
NICOLE, rit: Hi, hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Qu'as-tu à rire?
NICOLE: Hi, hi, hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Que veut dire cette coquine-là?
NICOLE: Hi, hi, hi. Comme vous voilà bâti! Hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Comment donc?
NICOLE: Ah, ah! mon Dieu! Hi, hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Quelle friponne est-ce là! Te moques-tu de moi?
NICOLE: Nenni, Monsieur, j'en serais bien fâchée. Hi, hi,
hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Je te baillerai sur le nez, si tu ris davantage.
NICOLE: Monsieur, je ne puis pas m'en empêcher. Hi, hi, hi,
hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Tu ne t'arrêteras pas?
NICOLE: Monsieur, je vous demande pardon; mais vous êtes si
plaisant, que je ne saurais me tenir de rire. Hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Mais voyez quelle insolence!
NICOLE: Vous êtes tout à fait drôle comme cela. Hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Je te.
NICOLE: Je vous prie de m'excuser. Hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Tiens, si tu ris encore le moins du monde, je
te jure que je t'appliquerai sur la joue le plus grand soufflet
qui se soit jamais donné.
NICOLE: Hé bien, Monsieur, voilà qui est fait, je ne rirai plus.
MONSIEUR JOURDAIN: Prends-y bien garde. Il faut que pour
tantôt tu nettoies.
NICOLE: Hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Que tu nettoies comme il faut.
NICOLE: Hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Il faut, dis-je, que tu nettoies la salle, et…
NICOLE: Hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Encore!
NICOLE: Tenez, Monsieur, battez-moi plutôt et me laissez rire
tout mon soûl, cela me fera plus de bien. Hi, hi, hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: J'enrage.
NICOLE: De grâce, Monsieur, je vous prie de me laisser rire.
Hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Si je te prends.
NICOLE: Monsieur, eur, je crèverai, ai, si je ne ris. Hi, hi, hi.
MONSIEUR JOURDAIN: Mais a-t-on jamais vu une pendarde comme
celle-là? Qui me vient rire insolemment au nez, au lieu de
recevoir mes ordres?
NICOLE: Que voulez-vous que je fasse, Monsieur?
MONSIEUR JOURDAIN: Que tu songes, coquine, à préparer ma
maison pour la compagnie qui doit venir tantôt.
NICOLE: Ah, par ma foi! je n'ai plus envie de rire; et toutes vos
compagnies font tant de désordre céans, que ce mot est
assez pour me mettre en mauvaise humeur.
MONSIEUR JOURDAIN: Ne dois-je point pour toi fermer ma porte à
tout le monde?
NICOLE: Vous devriez au moins la fermer à certaines gens.